Ce double rôle est taillé sur mesure pour elle et crée de l’espace pour sa créativité qui se retrouve dans ses plats aux arômes puissants La pénurie de personnel est-elle aujourd’hui si importante qu’en tant que cheffe de cuisine vous êtes responsable de deux restaurants à la fois?corin schmid: La pénurie de main-d’œuvre n’est apparue qu’après que j’ai décidé de reprendre le Drei Stuben en tant que cheffe de cuisine en plus de The Artisan Mon quotidien est plutôt sportif en ce moment (elle rit) Comment en arrive-t-on à reprendre un deuxième établissement en tant que cheffe de cuisine?C’est une histoire amusante Je suis à The Artisan depuis six ans lorsqu’un jour le tenancier Mark Thommen me demande: «Que penses-tu de l’idée d’un deuxième restaurant?» Quand le nom de Drei Stuben a été évoqué j’ai tout de suite dit: «J’en suis!» C’était comme si je rentrais à la maison Le Drei Stuben a vraiment quelque chose de spécial Les deux établissements sont ouverts 7/7 jours comment vous répartissez-vous les tâches?Je passe environ la moitié du temps dans chacun des restaurants Je n’ai pas d’emploi du temps régulier pour l’instant mais c’est amusant et les deux concepts me laissent beaucoup de place pour la créativité Cela me donne de l’élan – j’adore mon travail c’est une cuisine urbaine et branchée qui domine Avec quelle facilité passez-vous d’un univers culinaire à l’autre?Sans problème je traverse le jardin et je suis tout de suite dans l’ambiance Si je suis assise dans le salon rustique du Drei Stuben l’ambiance et l’inspiration s’harmonisent immédiatement Les établissements ont-ils des points communs sur le plan gastronomique?Oui le dénominateur commun est le lien à la nature une dame âgée qui parcourt les forêts zurichoises et cueille pour nous baies elle est revenue de sa cueillette avec 3 kilos de cèpes avec lesquels nous avons créé un plat juste avant le service du soir Les clients adorent ça et tout a été vendu le soir même Les deux établissements se concentrent sur les produits régionaux et une cuisine slowfood Dans quelle mesure pouvez-vous mettre des synergies en place?Nous collaborons avec les mêmes producteurs pour les deux restaurants Je passe commande en même temps pour les deux établissements et je fixe un jour de livraison identique Et nous entretenons des contacts étroits avec nos producteurs Quelles sont les limites auxquelles se heurte cette stratégie?Au début car seuls les légumes-racines comme la betterave le panais ou le céleri poussent en cette saison J’ai donc appris à sortir des sentiers battus j’ai créé un plat qui m’accompagne depuis des années dans de nouvelles variantes: un bourguignon de légumes-racines je prépare un jus à base de 30 légumes-racines différents grillés et d’un mélange d’herbes les légumes sont déshydratés jusqu’à ce qu’ils aient une consistance charnue puis ils sont ajoutés au jus réduit pour remplacer la viande Cela demande beaucoup de travail ...Chez nous Tous mes cuisiniers travaillent avec plaisir de cette manière Nous commandons des bêtes entières et utilisons tout Cela prend beaucoup de temps et c’est très salissant (rires) Mais c’est surtout mon sous-chef Beni qui aime s’occuper de ça Ce lien avec la nature et le respect de l’animal dans quelle mesure cela a-t-il un rapport avec vous personnellement?Beaucoup de choses Nous avions beaucoup d’animaux: des lapins L’amour et le respect des animaux et de la nature sont profondément ancrés dans mes racines Vous avez travaillé quatre ans chez Anton Mosimann dans son «Belfry & Private Dining Rooms» J’ai organisé tant de super événements avec lui Anton s’y promène comme s’il y était chez lui C’est un autre monde et assez impressionnant même la cuisine: elle est aussi grande qu’un gymnase et puis la brigade Qu’est-ce qui vous a le plus marqué?Il a toujours dit: «Je suis le dernier chef gentleman.» Et c’est ce qu’il vit on travaille de manière disciplinée et respectueuse Cela contribue tellement à l’ambiance de travail personne ne veut travailler dans une cuisine où l’on se fuit ni où règne la concurrence j’aborde ce point lors de l’entretien d’embauche qu’est-ce qui arrive en premier: le produit ou l’idée?Cela dépend parfois je découvre une nouveauté d’un producteur moins pelucheux et leur arôme est à tomber Je les ai mis en conserve et les ai servis en entrée pour le brunch avec de la stracciatella et du granola de sarrasin Et je suis une grande fan des techniques et des plats classiques un filet de bœuf Wellington se transforme alors en courge Wellington Le secteur de la restauration est en pleine mutation Entre nouveaux modèles de travail et pénurie de personnel quelle est votre approche?Nous relevons les défis du secteur en favorisant un climat de travail positif et en proposant des postes offrant des perspectives d’avenir afin d’attirer et de fidéliser les collaborateurs qui sont capables de travailler de manière flexible dans différents postes Etre la cheffe de cuisine de deux établissements présente de nombreux avantages Quels sont les inconvénients?Le temps libre est difficilement planifiable mais je dois prendre le temps de décompresser Il m’est aussi parfois difficile d’être pleinement présente pour les deux équipes j’ai envie de m’accroupir auprès de lui et d’essayer de résoudre le problème Qu’est-ce qui vous attend encore?J’aimerais écrire un livre de cuisine sur The Artisan avec le jardin et tous les projets que nous y menons Nous avons notamment une machine à compost qui transforme les restes alimentaires en terreau compostable en l’espace de 24 heures Une partie de ce compost atterrit dans les champs de notre producteur Slow Grow Ils y plantent pour nous l’arroche des jardins – plante herbacée presque oubliée – que nous intégrons aujourd’hui dans des plats Je raconterais de telles histoires dans le livre J’ai bon espoir que cela se produise un jour j’irai me prélasser quelque part sur une plage pour commencer la nouvelle année avec une énergie renouvelée C’est ainsi qu’elle gère son quotidien exigeant en tant que cheffe de cuisine des deux établissements zurichois Drei Stuben (10 collaborateurs 90 à l’extérieur) et The Artisan (20 collaborateurs 100 places à l’intérieur et à l’extérieur) Elle est soutenue par deux équipes engagées et par Mark Thommen Corin Schmid a fait son apprentissage de cuisinière à l’hôtel Metropol Elle a appris la pâtisserie sur le tas au restaurant Netts S’ensuivirent quatre années chez Anton Mosimann au Belfry elle a débuté à The Artisan et il y a trois ans elle a repris le poste de cheffe de cuisine elle est également cheffe de cuisine au restaurant Drei Stuben Votre lien direct      avec GastroJournal: 044 377 53 11